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Denis PROTÉOR

PARIS

En résumé

Interview de Denis Protéor chez lui - samedi 11 mars 2006
Par Evelyne Bennati

Pourquoi le terme d’”investigateur” ?

Investigateur plutôt qu’artiste. C’est l’engagement d’une existence. Le terme d’artiste a été galvaudé. Mes travaux sont partis d’enquêtes.

Le cabinet de curiosités
Ce joli terme de cabinet de curiosités, c’est vrai qu’il me convient s’il est pris dans son sens originel, c’est-à-dire cette fameuse pièce d’étude où on rassemble des exemplaires de la vie et de l’histoire naturelle, comme collection de coquillages, de plumes, d’insectes etc. Ca, ça me convient.
Mais là dans le cabinet de curiosités, on travaille. C’est l’atelier. Ce n’est pas un musée qu’on fait visiter à des amis, mais c’est un lieu secret, c’est l’endroit où, à part soi, personne ne peut entrer. C’est l’endroit où l’on se concentre, où l’on est à la fois seul mais entièrement disposé vers toutes les formes qu’a inventées la nature.

J’ai perçu une démarche de captation et d’aller au-delà, vers le caché et les séries que vous constituez...
A la place des séries, c’est mieux de dire enquêtes. Ces enquêtes sont tournées vers ce que moi j’appelle les gros morceaux par dérision. Il n’y en pas tellement.
Pour moi, il y a la joie - le cadavre, pas la mort je préfère dire le cadavre - la végétation, extrêmement importante chez moi, très présente- il y a ce que j’appelle le goût de la délivrance - le goût de la bataille - la domestication aussi qui pour moi explique beaucoup et la transfiguration.
Quand j’en serai à ce gros morceau que j’appelle la transfiguration, j’aurai déjà accompli une très bonne partie de mon chemin. Je perçois ce que ça peut être mais je ne saisis pas tout ; je cherche encore sur la transfiguration.

Je m’appuie même quand je peins, ou même quand je fais des photos d’ailleurs, sur les forces et les mouvements. Je ne m’appuie pas sur les idées ; elles ne m’intéressent pas tellement. Les forces et les mouvements, les déceler, les repérer, voir leurs couleurs, si un mouvement peut entraîner des forces ou si une force peut entraîner des mouvements, la pureté d’un mouvement m’intéresse énormément.
Je me suis beaucoup intéressé à l’eau, je suis allé partout étudier l’eau.
Un journaliste parle à propos du choc (maintenant je le sais, avant je ne m’en doutais pas, quand on voit mes photos), il parle de flux vitaliste. Ca me convient.
Il y a un impact d’accord, mais au-delà de cet impact, il y a une volonté d’apporter encore de la vie, encore une substance qui fait que ça ne s’arrête jamais.

Vous exprimez-vous essentiellement avec la photo ?
Non. La photo chez moi est accessoire. C’est vrai que j’ai fait énormément de photos; je continue à faire des photos car elle a un côté extrêmement pratique. Vous parliez de captation tout à l’heure, là c’est une captation instantanée, dans la seconde.
La peinture me demande par exemple beaucoup plus d’efforts que faire une photo ;
la musique c’est encore beaucoup plus d’efforts ;
la vidéo ;
j’écris, j’écris tout le temps ; chez moi, écrire c’est comme trier. J’ai besoin de faire des tris.
je sculpte aussi un petit peu, mais comme je n’ai pas la place je me réfrène.
Les “gros morceaux” que vous évoquez sont apparus peu à peu ?
Le premier ça a été la joie. Je me suis toujours demandé ce qu’on entendait par la joie. J’ai retrouvé il n’y a pas très longtemps un très ancien texte de 1983 qui s’appelait “Premiers accomplissements dans l’ivresse”. Tout de suite ce terme est venu et chez moi la joie est liée à l’ivresse.
Ce n’est pas l’ivresse de l’alcool ou de drogues, c’est l’ivresse au-delà des dépendances.
Chez moi, très grande volonté de m’écarter des dépendances.
C’est pour cela que je suis très mobile et à la limite nomade. J’ai déménagé souvent.
Dans cette ivresse, ivresse puisée à l’intérieur de soi, expliquer exactement comment encore je ne sais pas, mais je sais que ça marche, je le fais. c’est de cette ivresse dont je veux parler.
Cette ivresse amène à un état second, qui fait sortir de soi. On est bien sûr dans l’ailleurs.

Cette ivresse ne vient-elle pas de ce que vous percevez la substance du vivant ?
Oui. Ce que je sais de l’ivresse, ça met à nu. Mais ça met à nu pas dans le sens moral, disons que ça met à nu pour ramener à un état natif. Moi je garde en tête, du point de vue des sonorités par exemple, tout ce que j’ai entendu et qui a été enregistré dans la jungle, en Papouasie, en Afrique... Toutes ces musiques que font les tribus qui existent encore ou qui existaient.
Ces musiques là m’ont toujours fait penser à un son que je n’ai jamais entendu mais d’instinct je sais comment il està peu près constitué, c’est le son du lithophone, le premier instrument des hommes préhistoriques. C’est tout simplement un stalactite frappé avec une pierre, qui dans une grotte produit un écho bien particulier.
Ca c’est l’état natif, c’est une métaphore, mais c’est l’état natif.
Comme cet homme préhistorique qui a dans la bouche un ocre écrasé. Il le mélange avec sa salive. Il crache dans sa main, souffle et laisse l’empreinte de sa main.
Dans cette simplicité, c’est la nudité. C’est la base enfin, c’est comme l’herbe des fossés, c’est pareil. Ca j’aime beaucoup. Ca me guide parce que ce n’est pas rattaché à un ordre social qui parasite toutes les conclusions qu’on pourrait avoir.
On est en quelque sorte seul à seul avec des éléments qui représentent les forces et les mouvements. C’est ce que je cherche quand je cherche l’état second. c’est ce que je veux.
La joie, je l’appelle la joie entacte quand je l’atteins à ce moment-là. comme je cherche l’être intact, un être délivré des structures du fonctionnement, qui n’a pas besoin de se justifier, d’en référer à un code, c’est un être qui est pour lui.

Dans cette recherche de l’origine, ce n’est pas l’enfance de l’humanité que vous recherchez ; c’est plutôt la profondeur ?
Non, parce que dans l’enfance de l’humanité il existait déjà à mon avis un ordre social. C’est
quelque chose qui existe mais aujourd’hui qui a complètement... Je ne sais même pas si ça a été annihilé ou si ça existe encore. Mais ce serait une mauvaise piste de chercher de ce côté-là. On irait vers quelque chose comme une critique intellectuelle et je ne veux pas. Je veux rester à l’interieur de méthodes personnelles. Ces méthodes, c’est l’ivresse. Même quand je peins je suis en état second. Je n’entends plus rien, je ne vois plus rien.

“L’étrange monsieur”, c’est vous ou c’est la presse ?
l’étrange monsieur, c’est le surnom que m’ont donné mes complicités, ces femmes que j’ai rencontrées et qui, on peut le dire, m’aident dans ma recherche. J’ai trouvé ça très joli.
L’étrangeté, chez moi est une valeur. Quelque chose qui est étrange, tout de suite je dois le caractériser. Je sais que c’est quelque chose qui va exister par soi.
Dans mes lectures, il y a bien sûr Moby Dick. Moby Dick je trouve que c’est vraiment la recherche de l’étrange Ce capitaine déjà estropié par cette baleine, pourquoi la poursuivre encore et encore, ce n’est pas pour la baleine elle-même.

Vous recherchez le caché, aller au-delà de l’apparence
Ca bien sûr, je dirai même qu’instinctivement tout le monde recherche ce qu’il y a derrière l’apparence. Quand un homme rencontre une femme, il y a d’abord l’éblouissement d’accord, mais ça ne suffira jamais. Pour une femme, c’est pareil.
Le chercher c’est une chose, mais vivre avec, c’est encore autre chose. Vivre sans arrêt en compagnie avec l’impalpable, c’est un mode de vie bien particulier, étrange.

N’essayez-vous pas de créer un ordre dans le désordre ?
En maths on dit qu’on peut de toute façon faire des ensembles. L’absolu, c’est un ensemble. A la limite, je m’empêche de penser de cette manière parce que pour moi ça va aller vers une intellectualisation et je ne veux pas. Je sais que si je fais ça, je vais me servir de toutes mes références culturelles et j’irai sur des fausses pistes.
Je le vis ; il n’y a que de cette manière qu’on peut le percevoir honnêtement. Ce serait très prétentieux de dire qu’on peut appréhender un mouvement, comme la décomposition par exemple. Que faire pour aller voir de plus près : aller voir des cadavres. Et puis se laisser imprégner par toutes ces effluves qu’il y a face à un cadavre.

Ca se fait comment ? Ca participe vraiment de votre façon de vivre ?
Par exemple, il ya de ça 4 ans je crois, je quitte Paris et je vais m’installer parce que j’y étais invité, dans un village d’artistes. Entre parenthèses, ce qui était intéressant pour moi c’est qu’on m’avait alloué une maison gigantesque.
Quand je me suis retrouvé dans ce qui était un lieu semi-sauvage, je me suis tout de suite demandé mais qu’est-ce que ce lieu contient de forces et de mouvements.
Je me suis tourné vers les animaux d’élevage et j’ai voulu savoir comment il naissaient et comment ils mouraient. Je suis allé dans les fermes.
Je voyais les naissances des animaux, je photographiais, je filmais. Ensuite j’ai voulu considérer ces animaux dans leur cheminement comme des êtres humains. Je voulais voir des animaux, qu’est-ce qui arrivait à un animal quand il était frappé par la mort par accident ?
On prend son cadavre ; où va-t-il ? Je suis allé chez l’équarisseur et j’ai vu ce que devenait la dépouille d’un animal, comment on lui enlève sa peau ; je suis resté, j’ai photographié, filmé.

Ces forces et ces mouvements renvoient-ils au terme de cycle ?
Oui. Pourquoi pas. Oui. On pourrait les appeler les mini-cycles parce que à mon avis ils n’ont pas tellement d’importance. Même quand je vois ce qu’on appelle le cycle des saisons, j’ai du mal à y croire. Pour moi ce n’est pas vraiment un cycle. C’est une espèce d’enchevêtrement très irrégulier. On croit voir revenir les saisons toujours les mêmes et en réalité c’est faux et même aléatoire quelquefois. Un cycle peut revenir mais si on regarde l’ouragan El Nino qui a tout détraqué, tous les poissons s’en vont en sens inverse du Gulf Stream, les fonds complètement perturbés, des îles disparues, alors le cycle...

Vous m’avez parlé de vos collections très diverses...
Ca peut être ça mes collections : ça c’est un extrait d’un rivage, de coquillages, d’oursins, de crabes et c’est dans le formol. Il suffit que je le regarde, pour moi ça me captive toujours autant et c’est pour ça que je ne les range pas dans mes caisses. Ces caisses ici sont pleines de photos, de textes, de dessins, d’enregistrements. C’est une toute petite partie de mes archives, le reste est dans un entrepôt. Ce qu’il y a ici me sert à mes expositions immédiates ; ensuite je retourne à l’entrepôt, je ramène les caisses qu’il me faut, c’est tout un système.
Ce qu’il faut voir c’est que ce sont des archives vivantes, c’est-à-dire elles sont tout le temps en train de changer, de se multiplier entre elles, c’est comme un système cellulaire, ça n’arrête jamais ; ce ne sont pas des choses qui sont posées.
Maintenant avec la diffusion de mes travaux, ca s’en va ailleurs dans les autres pays, ce que j’aime bien.
Ca ce sont des corbeaux que j’ai trouvés dans la forêt (corvux corax) le grand corbeau noir

A partir de cette collecte, vous informez-vous sur ce que vous avez collecté ?
Non, c’est comme des objets spirituels, ça peut être comparé aux totems à l’entrée des villages du temps des Celtes ou des choses comme ça. Ce sont des objets qui ne me laissent pas de répit par rapport à ma pensée, c’est-à-dire que quand ils sont là, si jamais j’avais un trou, ça revient sans arrêt sans arrêt sans arrêt. J’ai ça mais j’ai aussi une collection de plumes, qui est dispersée car j’en ai énormément, des fossiles, là c’est une huître fossile, des végétaux, comme toutes sortes de pommes de pin, des graines aussi, des coquillages bien sûr, des ossements, j’en ai beaucoup.

La collecte d’objets s’est-elle faite en parallèle aux démarches d’investigation de domaines particuliers ?
Chaque fois que je suis dans un milieu naturel, je ramène quelque chose, outre photos et films ou enregistrements sonores. Je ramène quelque chose que je trouve par terre parce que bien sûr je ne cueille rien, je n’arrache rien, des choses que je trouve sur le sol, posées ou quelquefois en creusant, ce n’est pas un préjudice pour la nature.
De toute façon c’est de l’ordre de la présence. J’adore que tous ces éléments soient là.
D’ailleurs dans mes journaux de bord, je colle des feuilles, des fleurs, des tiges...

Ca dénote une très forte attention à votre environnement
Oui. Quand je suis dans un milieu naturel, maintenant ça m’arrive avec les grandes villes, quoique elles ont tendance à s’uniformer. Mais il y a toujours dans une ville un lieu que moi j’appelle le lieu sans nom ; on ne sait pas très bien pourquoi il est fait, personne ne connaît l’adresse. C’est un lieu assez désolé. Ces lieux-là m’attirent. Aussi les lieux qu’on pourrait appeler la face cachée d’une ville, qu’on pourrait appeler lieu marché de la chair m’intéressent, ce qui s’y passe c’est vraiment la flétrissure de l’industrie. Pour moi l’industrie est un ennemi évidemment. C’est là étalé avec une complaisance telle qu’il ne faut pas l’ignorer dans un système et je ne l’ignore pas. Souvent dans mes écrits je parle de l’industrie et de l’instrument de torture que représente l’industrie. Et je fais référence à ce que j’appelle les marchés de la chair.
On peut dire il ya l’industrie pharmaceutique oui mais il y a toujours ça.

Votre système, comment le qualifieriez-vous ?
Je ne sais pas. Disons que je crois, mais c’est en toute modestie, que ce que j’ai entrepris c’est une gigantomachie, c’est-à-dire un combat de géant. C’est beaucoup trop en réalité pour une vie mais bon le point de départ est là après on verra. C’est vraiment tous ces gros morceaux en même temps. L’idée c’est de les traiter en même temps, pas un à un, sinon je perdrais des liens ; ils sont toujours tous là ; les traiter tous en même temps, tous les jours, une gigantomachie.
Ce système, si on peut l’appeler système, développe ce que Ernst Jünger appelait l’esprit titanique. Mettons je marche dans la rue, je marche sur un trottoir. Il y a une platebande. Je vais autant remarquer la composition des végétaux de la platebande que les personnes qui vont marcher sur le trottoir que la construction du trottoir, la construction des immeubles, que les sous-sols de la ville, que le temps qu’il fait, que la pression atmosphérique etc etc. Et c’est comme ça tout le temps, on peut appeler ça l’esprit titanique ; c’est comme avoir sans arrêt une vision à 360°.

Mais alors pour ne ne pas perdre pied ?
pour ne pas perdre pied il y a ça, il y a heureusement les mediums artistiques.
Quand j’étais dans les morgues, j’étais entouré de cadavres j’étais complètement ivre. Je ne regardais même pas ce que je photographiais. J’avais mon appareil à bout de bras, mon appareil photographiait pour moi. Ma canne blanche. J’étais dans l’aveuglement de l’ivresse.
C’est pareil pendant les cérémonies. Pendant les cérémonies, les caméras sont là elles enregistrent pour nous et moi l’appareil photo je le tiens comme ça.

je me suis demandée comment vous pouviez être complètement dedans et à distance ?
C’est curieux. Les cérémonies m’ont fait comprendre que dans ma manière de faire il y avait dédoublement. C’est vraiment curieux.
Quand je suis mettons dans la forêt, la forêt m’enivre énormémemnt, je marche, je m’approche d’un arbre, je tourne autour d’un arbre, je continue à marcher et pourtant je peux revenir en arrière et me dire cet arbre je dois le photographier. Mais je suis ivre donc je ne devrais pas y penser. Il ya un dédoublement réel mais très physique. Mais c’est pratique, c’est très pratique je ne me souviens de rien, exactement comme un homme ivre je n’ai aucun souvenir d’avoir été dans les morgues, rien.
Je regarde les photos, je regarde une photo, je me vois dans le miroir de la morgue avec le masque hygiénique et j’ai du mal à me reconnaître .C’est pareil quand je me regarde dans les films des cérémonies, je regarde quelqu’un. Parce que je ne me souviens de rien.
Ca m’allège beaucoup, c’est comme si à chaque fois je repartais.
Je me suis souvent demandé si l’ivresse emplissait ou vidait, si après une ivresse, je suis complètement vide ou rechargé à bloc, l’état dans lequel je suis après, d’abord il faut environ 24H pour que je me remette d’une ivresse, l’état dans lequel je suis, je suis incapable de dire si je suis fatigué ou vitaminé, je ne sais pas.

La perte de mémoire, est-ce une façon de borner cet illimité ?
Je dis que je ne me souviens de rien ; en fait je me souviens de tout. Tout est inscrit, mais il y a un travail à faire pour rechercher cette mémoire de l’homme ivre.
Les souvenirs faits dans l’ivresse restent cachés, ils restent cachés il n’y a rien à faire. D’une manière logique, ça se comprend. Quand on revient de l’ivresse, on n’est plus ivre ; on ne peut pas se souvenir de l’homme qui était ivre, on est l’autre homme. Comment on ferait pour s’en souvenir ?
Heureusement il y a les films et les photos.
Le corps enregistre. D’où me vient ma confiance : je prends des risques très très souvent et ce n’est pas pour ça que je suis effrayé ; ça vient de cette ivresse, qui me donne une espèce de vitalité qui n’en finit pas.

Toutes les mises en garde sont balayées
Et même toute convention sociale Ca n’a aucun rapport avec une cérémonie, tout ce qui est le quotidien de quelq’un et en l’occurrence des femmes qui m’accompagnent dans ces cérémonies, leur quotidien on s’en fiche et mon quotidien aussi.

C’est un monde parallèle
je me demande si ce n’est pas le vrai monde. L’autre monde est parallèle à mon avis. Je pourrais l’appeler le monde substantiel, dans le monde substantiel c’est les choses vraies qui arrivent. Dans le monde ordinaire, c’est une histoire d’obéissance à des divers degrés.

j’ai lu sur votre site que l’état second en fait pour vous c’est l’état premier
Je l’appelle état second pour des commodités de langage, mais j’aimerais bien l’appeler l’état premier. C’est le premier état.
D’ailleurs toutes les religiens sont nées par l’état second ; il n’y a pas de religon rationnelle, ni de religion pensée, de religion déduite. Ca n’existe pas.

Cela vous a-t-il donné envie de vous intéresser aux modifications de perception dans des religions, comme les transes vaudoues, mais elle renvoient au collectif
C’est collectif à cause de ce que j’appelle le complexe de la communion, c’est-à-dire c’est comme un cautionnement. Si on veut être en transe, alors il faut être ensemble. Si on est ensemble, le sens s’est élargi, alors on a raison.
C’est tout à fait le contraire. L’ivresse isole ; c’est réservé à un tout petit comité. Les cérémonies c’est en général jamais plus que deux.

C’est comme en Amour. Son propre désir s’exprime à travers l’objet d’amour
A propos de l’amour, je crois que l’amour ce n’est qu’un avatar de l’ivresse Il y a d’abord eu l’ivresse et à cause de la socialisation il a fallu caser cette ivresse. On a inventé l’amour.
Une cérémonie ce n’est pas sentimental.

L’amour est le masque social de l’ivresse
Pour moi, oui bien sûr.

On pense souvent que l’amour est altruiste
Cette histoire d’altruisme, ça vient du fait que l’on ne fait pas la différence entre pilier et fardeau. Quand on voit un mendiant, on ne se demande jamais si c’est un fardeau ou un pilier. Pour moi, ce sont des piliers. Ils sont là depuis toujours, donc ce sont des piliers. Ils sont là pour soutenir une société, une croyance, des systèmes ; ce n’est pas une société qui va les porter. C’est eux qui portent l’obole.
Avant de se dire je suis altruiste, il faut se demander si on a fait la distinction entre pilier et fardeau. En général on ne la fait jamais.

Vous écrivez quotidiennement. Comment se déroulent vos journées ?
fin de l’enregistrement (problème de pile)
Notes manuscrites :
Travail 2 ans et demi dans un hopital psychiatrique : démarche artistique avec des malades. Années éprouvantes mais passionnantes.

Il ya beaucoup de questions, c’est le raffinement, mais peu de problèmes.

Dans mes enquêtes, les choses se mettent en place. Des hommes lanternes me guident. Par exemple, la morgue est un lieu clos. j’ai pu prendre toutes les photos que je voulais et les faire sortir; les montrer à l’extérieur, mettre des dessins sur les corps. J’ai pu faire ce que je voulais.

D’accord pour appréhender son travail avec le terme de magie mais dans un sens poétique sinon je me méfie de la magie.

La gestation du travail
le premier impact petit a été le dessin. Je dessinais énormément. Adolescent, vers les 19 ans, j’ai arrêté d’aller à l’école. Je considérais que l’on ne m’avait pas assez appris. J’ai passé un an dans ma chambre et à la bibliothèque. J’ai lu énormément et écrit. Je pouvais ouvrir un livre avec un photo de forêt et la regarder des heures. Je me sentais happé dans l’image.

Expériences
Exploration de la forêt pendant 15 ans : c’est le berceau réel. Qu’y-a-t-il de caché dans la forêt ? Ce sont les animaux. J’ai appris dans la forêt qu’il fallait faire des efforts pour voir ce que vous appelez la vie cachée.
La forêt est le paradoxe même ; c’est à la fois tendre et dur. C’est un lieu d’exactitude, la convergence des trajectoires.
Il s’agit de décrypter et pas d’imaginer. Je n’ai pas d’imagination.
Je veux compléter mon être et en même temps j’ai la perception d’être vide, un fantôme.
Pousser au maximum mes sens. Mais il ya un retour à soi, indispensable pour un minimum de clairvoyance. Je veux être un générateur, un pourvoyeur de vie.

Comment se sont mises en place les premières expositions ?
J’étais prêt. Je ne tiens pas compte du public.
Je me suis rendu compte qu’il fallait développer la ruse dans les conventions sociales, moyen de protection de ma créature. Je ne savais pas que j’allais choquer.

Qu’est-ce que le cadavre pour vous ?
Une entité, un blason.
Je suis cérémoniel. C’est différent du rite. Dans le rite, il n’y a rien qui change.
Je recherche le vertige et non l’ivresse, le vertige en permanence.
J’essaie de percevoir les différents niveaux de réalité, qui ne sont pas hiérarchisés, mais s’enchevêtrent.


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